Château Gaillard, la forteresse de Richard Coeur de lion

Construit dans l’Eure, entre 1197 et 1198, les vestiges du « Château-Gaillard », construit sur ordre du roi anglais Richard Cœur de Lion pour barrer la route au roi français Philippe Auguste, dominent toujours magnifiquement la Seine au cœur de la Normandie.
Situation
Les Andelys, Eure. Les vestiges dominent magnifiquement un méandre de la Seine normande, depuis un éperon rocheux dominant la plaine d'environ 90 mètres. Visite libre de la basse-cour et du châtelet, payante pour accéder au réduit défensif et au donjon.
Historique
Au 12ème siècle, deux royaumes ennemis s'affrontent à coups de batailles : Philippe Auguste, à la tête du royaume de France et le roi d’Angleterre et duc de Normandie Richard Cœur de Lion. En juillet 1190, le pape leur demande de faire une trêve pour partir ensemble vers la terre sainte et reconquérir Jérusalem. Les deux rois répondent favorablement à la requête du Pape. Mais Philippe Auguste prétend rapidement qu'il doit rentrer en France, suite à des problèmes de santé, et va profiter de l'absence de Richard Cœur de Lion pour reconquérir la Normandie. A son retour, le roi d'Angleterre reprend les armes face à son rival qui l'a trahi. Ils vont se battre durant quatre nouvelles années, jusqu’en 1196, lorsque l’Eglise les contraint à un accord de paix. Philippe Auguste a étendu son royaume vers l’Ouest et Richard Cœur de Lion décide de bloquer les français en lançant la construction d’une formidable forteresse aux Andelys.
Le château est construit par 6000 ouvrier en moins de deux ans, entre 1197 et 1198. Richard Cœur, dès la fin de l’édification, se serait exclamé : « Qu’elle est belle, ma fille d’un an ! Que voilà un château gaillard ! ». Le nom serait resté. Le roi anglais trouve la mort l’année suivante, fauché par un carreau d’arbalète lors du siège du château de Châlus-Chabrol dans le Limousin. Jean sans Terre succède à son frère. Après avoir été couronnée roi d'Angleterre, il prend possession de Château-Gaillard où il projette de construire une grande résidence princière.
En août 1203, Philippe Auguste décide de mettre le siège devant ce château qui bloque ses velléités d’expansion. L'avancée des troupes françaises est rapide, ils brûlent le pont sur la Seine et s'emparent des Andelys. Les habitants du village se réfugient dans le château. Philippe Auguste commence par isoler le château de façon à épuiser les réserves de nourriture des défenseurs. Du côté anglo-normand, le gouverneur Roger de Lacy comprend le risque et expulse une partie de la population andelysienne réfugiée au château. Les conditions de vie dans la forteresse deviennent de plus en plus difficiles, la famine mais aussi le froid (par manque de bois de chauffage) commence à décimer la garnison. Nombre de villageois meurent aussi de faim et de froid dans les fossés, repoussés par les deux armées. Après 7 mois de siège, Philippe Auguste lance finalement l’attaque en mars 1204. L’intense offensive emporte les unes après les autres les trois enceintes. Pris au piège, Roger de Lacy avoue sa défaite et se rend aux français.
La légende qui veut que les assaillants soient entrés dans la basse-cour par les latrines ne repose sur rien de sérieux. Ils se seraient au contraire introduits par une fenêtre un peu trop accessible d’une chapelle construite contre l’enceinte sur ordre du roi Jean sans Terre.
Durant la guerre de Cent Ans, Château-Gaillard subira encore plusieurs sièges. Devenu un repère de brigands, la forteresse sera finalement démantelée par décision royale en 1600.
Description
Vers 1250, l'édifice est imposant et novateur : il mesure plus de 175 mètres de l’est à l’ouest pour près de 80 m du nord au sud (sans compter les profonds fossés qui entaillent le relief au nord et, dans une moindre mesure , au sud), comporte 12 tours et une tripe enceinte, capables de multiplier les obstacles face à un assaillant. Richard Cœur de Lion s'est inspiré des châteaux syriens (les fameux Kraks de Terre Sainte) qu'il a vu lors de sa croisade.
A l’est se trouve un châtelet à peu près triangulaire protégé par un rempart d’environ 150 m de développement, cantonné de trois grosses tours d’angle circulaire de 11 m de diamètres et flanqué de deux autres de 8 m de diamètre. La tour de l’angle nord-ouest est une tour portière accolée à un ouvrage rectangulaire, accessible par un pont dormant enjambant le fossé doublé d’un pont-levis.
Le châtelet est relié au château fort principal par un autre pont dormant associé à un nouveau pont-levis.
Le château lui-même, de forme à peu près rectangulaire, est ceint d’un rempart de 320 m de développement, renforcé par quatre nouvelles tours circulaires de 11 m de diamètre et deux quadrangulaires de 11 m de côté. Un puit de 120 m de profondeur (20 m plus bas que le niveau de la Seine) est placé à l’est de la basse-cour, alimentant nombre de citernes, tandis qu’une grande chapelle de 11 m sur 19 s’adosse à l’angle sud-est de la courtine.
Un réduit défensif elliptique, protégé par un dernier fossé et ceint d’une chemise de 145 m de développement présentant un flanquement en feston (17 demi tours rondes engagées destinées à accroitre sa résistance), protège la haute cour.
Un massif donjon circulaire à éperon de 19 m sur 15, accessible depuis le premier étage, doté de mâchicoulis (posés sur de puissants contreforts posés sur le talus de base et qui se rejoignent en arc brisés), flanque la courtine sud. Un vaste bâtiment résidentiel de 25 m sur 8 s’adosse à la courtine, dans le prolongement ouest du donjon. Des galeries de hourds renforcent en temps de guerre le sommet des tours et des courtines.
Vestiges
Les principaux vestiges sont le réduit défensif et son donjon, mais un grand nombre d’autres murs ruinés permettent de se représenter les dimensions initiales du château fort du temps de sa splendeur.