24 novembre 1859 : Darwin publie l’origine des espèces

Le 24 novembre 1859 sort en librairie, à Londres, un ouvrage au titre ambitieux qui résume à lui seul le contenu : De l'Origine des espèces

Son auteur est un quinquagénaire seulement connu des spécialistes, Charles Darwin. Pourtant, son ouvrage bénéficie d'un succès immédiat et le premier tirage (1250 exemplaires) est épuisé dans la journée. Les théories développées par Charles Darwin allaient bouleverser le dogme soutenu par les vieilles religions d'une nature immuable depuis la création du monde.
Elles soutiennent et démontrent, au contraire, que les espèces animales actuelles (humains compris) sont les descendants de formes de vie antérieure ayant évolué sur des millions d’années sous la pression de la sélection naturelle – indépendamment, donc, de toute intervention ou volonté divine.
Des exemples d’évolution récents :
Il apparaît aujourd'hui évident que tout organe ayant une fonction définie, par exemple la nageoire du poisson, est une adaptation à un milieu et le résultat d'une sélection naturelle. Cependant la démonstration scientifique doit, elle, passer par la mise en évidence d'une corrélation chiffrée entre les variations d'un caractère héréditaire et celles d'un paramètre précis de l'environnement. Parmi les exemples les plus célèbres, peuvent être cités :
Les pinsons des Galápagos : les épisodes de sécheresse furent suivis par une raréfaction des graines molles et donc par une augmentation de la population de pinsons dotée de becs plus gros, leur permettant de briser la coquille des graines restantes, plus dures.
La sélection naturelle chez les bactéries résistantes aux virus bactériophages a été mise en évidence par l' expérience de Luria et Delbrück. Ils ont en effet démontré pour la première fois que les mutations préexistent à la sélection et qu'elles sont bien aléatoires.
Le mélanisme industriel de la phalène du bouleau en Angleterre, est un exemple de microévolution mis en évidence par le zoologiste britannique Bernard Kettlewell : dans cette espèce de papillons, la proportion d'individus clairs aurait diminué du fait de la pollution qui détruisait les lichens (blanc) qui se développaient sur les surfaces des troncs d'arbre sur lesquels ils se posaient. En effet, les individus clairs (initialement présents en majorité), étant désormais plus visibles que les autres sur les troncs noir, étaient plus sujets à la prédation que les autres. Les phalènes sombres qui existaient avant la pollution seraient alors devenues majoritaires. Puis, le phénomène se serait inversé lorsque les industries polluantes ont progressivement disparu permettant le retour du développement du lichen sur les troncs.
La sélection naturelle produit aussi ses effets dans l'espèce humaine. La capacité chez l'adulte à digérer le lactose du lait a été sélectionnée il y a environ 9 000 ans dans les populations humaines originaires d' Europe du nord ou d' Asie centrale où on élevait du bétail pour son lait, mais pas dans d'autres populations où cet aliment est absent. Récemment, il a été découvert que cette capacité était présente également chez certaines ethnies d'Afrique de l'Est, les Tutsis et Peuls du Soudan, de Tanzanie et du Kenya, mais à partir de trois autres mutations, sélectionnées indépendamment l'une de l'autre. Ces dernières seraient apparues il y a 7 000 à 3 000 ans. Il s'agit là d'un exemple de convergence évolutive.
La persistance d'une maladie génétique comme la drépanocytose est due au fait que l' allèle responsable de la maladie confère aussi un avantage sélectif en augmentant la résistance au parasite responsable du paludisme.
L'humain peut aussi exercer involontairement une pression de sélection sur certains organismes dont l'évolution, en retour, peut être néfaste pour l' économie ou la santé de notre espèce : la résistance aux antibiotiques, l’illustre parfaitement. Un exemple parmi tant d’autres, depuis 1961 les bactéries staphylocoques dorés résistantes à la méticilline se sont multipliées et rendent inefficaces le traitement par cet antibiotique dans un grand nombre de cas. Ces résistances sont à l'origine de nombreuses maladies nosocomiales en milieu hospitalier.
Le darwinisme progresse partout dans le monde, porté par l’éducation
Les Français s’affichent volontiers « darwiniens », dans leur ensemble, même si le retour d’une certaine forme de radicalité, islamique essentiellement, replonge une partie de la population dans une vision plus archaïque des évènements. Il s’agit cependant là d’une attitude minoritaire, moins de 10 % de nos concitoyens croyant que l’être humain a été créé par Dieu, tandis que la majorité des Français (55 %) affirme adhérer à la théorie scientifique de l’évolution.
La situation est bien différente aux États-Unis où 38 % des Américains se disent « créationnistes » (les espèces animales auraient été créées par Dieu d’un coup sous leur forme actuelle). Par ailleurs, 38 % des Américains pensent que l’être humain a évolué, mais que cette évolution a été guidée par Dieu (thèse du « dessein intelligent ») et seulement 19 % affirment adhérer à la théorie de l’évolution.
Comment expliquer que la théorie de l’évolution ne parvienne pas à convaincre la majorité des Américains alors qu’elle fait l’unanimité chez les scientifiques du monde entier et que les preuves empiriques de sa validité ne cessent de s’accumuler depuis 160 ans ?
Aux États-Unis, la question de l’origine de l’homme et des autres espèces fait l’objet de débats nourris et d’oppositions farouches de la part des églises. Pour les créationnistes, l’enjeu est de taille. Ils cherchent à renforcer une forme de domination morale et politique sur le pays et ainsi à retarder la compréhension de la théorie de l’évolution par le plus grand nombre. Ils savent que le darwinisme permet d’expliquer le fonctionnement de la vie en se passant de l’hypothèse divine. Se battre contre la théorie de l’évolution revient à lutter contre une vision scientifique du monde qui les menace, à plus ou moins long terme.